L'Amérique latine espère trouver un véritable interlocuteur en Obama

CARACAS (AFP) — La victoire présidentielle du démocrate américain Barack Obama fait naître l'espoir en Amérique latine de relations apaisées avec le puissant voisin du nord, alors que le sentiment anti-américain s'y est accentué face à l'unilatéralisme de l'administration de George W. Bush.

Lors de sa campagne électorale, Obama avait affiché sa volonté de réviser les relations de son pays avec l'Amérique latine.

Le nouveau maître des Etats-Unis va en effet se trouver d'emblée confronté à un délicat contexte de tensions qui s'étaient accrues récemment entre l'administration Bush et une Amérique latine aux gouvernements majoritairement de gauche.

Il s'agira pour lui de gérer une crise diplomatique en cours avec le Venezuela et la Bolivie, une hostilité grandissante du côté de l'Equateur et du Nicaragua, et la question de l'embargo que les administrations américaines successives ont imposé à Cuba depuis 1962.

D'autant que tous ces pays ont en outre largement favorisé ces derniers temps une coopération en matière énergétique et militaire avec la Russie, l'Iran et la Chine et semblent enclins à l'accentuer davantage.

Au premier rang du clan des "anti-impérialistes", Obama va trouver le bouillant Vénézuélien Hugo Chavez, bête noire de l'administration précédente. "Nous voulons un président des Etats-Unis avec lequel on peut parler (...) nous n'aspirons qu'à une seule chose, qu'ils nous respectent (...) nous voulons considérer les Etats-Unis comme un peuple frère et ses entrepreneurs comme des partenaires", déclarait peu avant les élections américaines le chef d'Etat vénézuélien.

Selon Pablo Kornblum, professeur d'Economie internationale à l'Université argentine John F. Kennedy, "fort d'une vision plus progressiste et conciliatrice, Obama tentera de conclure des accords économiques consensuels et une amélioration générale en termes diplomatiques".

L'Amérique latine que va découvrir Obama connaît un processus de changements dans le cadre d'initiatives d'intégration telles que l'Union des Nations sud-américaines (Unasur) que les Etats-Unis ne sauraient ignorer, relèvent en outre les experts de la région. Avec Obama, "l'époque de l'intervention et de l'agression des Etats-Unis est révolue", estime Omar Galindez, professeur à l'Ecole des Hautes études diplomatiques Pedro Gual du Venezuela.

L'avènement d'Obama pourrait être l'occasion de réexaminer les accords commerciaux et les relations diplomatiques sur de nouvelles bases, selon les analystes sud-américains.

A Cuba, la victoire d'Obama porte l'espoir d'un assouplissement de l'embargo, voire de "relations normales et respectueuses", estime le ministre cubain des Relations extérieures, Felipe Perez Roque.

"L'embargo est plus vieux que M. Barack Obama. Il devra décider d'admettre qu'il s'agit d'une politique d'échec (...) ou bien de persister dans cet aveuglement et cette cruauté, à tenter de soumettre le peuple cubain par la faim et les maladies", ajoute-t-il.

Pour la Bolivie du socialiste Evo Morales -- qui a établi des relations diplomatiques avec l'Iran et expulsé récemment l'ambassadeur américain -- "avec Obama s'ouvre une opportunité d'assouplissement et de changement", juge l'analyste Carlos Cordero.

Sur la même ligne, le chef d'Etat équatorien Rafael Correa -- qui a rejeté le Traité de libre échange (TLC) avec les Etats-Unis -- a admis que Obama constituait "une surprise", son discours se révélant "plus proche" des positions de son pays.

En Argentine, la présidente Cristina Kirchner relevait la "personnalité, le discours et la façon d'appréhender les choses absolument différente" d'un président Obama.

Le président mexicain Felipe Calderon, pourtant conservateur, avait souligné en septembre que les démocrates bénéficiaient "d'un net avantage sur les républicains qui ont conçu un programme trop conservateur sur le thème de l'immigration".